La Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu, le 17 octobre 2024, l’arrêt C-650/23 https://www.dalloz-actualite.fr/sites/dalloz-actualite.fr/files/resources/2024/10/celex_62023cj0650_fr_txt.pdf qui porte sur un cas très particulier, et, plus exactement, deux cas quasiment identiques :
– le billet d’avion est inclus dans un voyage à forfait (vol + prestations au sol). Le tour opérateur délivre aux voyageurs un document qui identifie parfaitement le trajet aérien : numéro de vol, aéroports de départ et d’arrivée, date, et horaires.
-Puis, peu avant le vol (la veille dans un cas, 8 jours avant dans l’autre cas), le tour opérateur (pas la compagnie aérienne) informe le voyageur d’un changement de vol. Dans un cas, l’arrivée se fait dans un autre aéroport avec un départ quelques heures plus tôt. Dans l’autre cas, le tour opérateur (pas la compagnie aérienne) déclare le vol prévu annulé avec réacheminement, par un autre vol, deux jours plus tard.
– Dans un des cas, il s’agit d’un vol charter.
Bien entendu, les passagers ne se présentent pas à l’embarquement des vols annoncés comme annulés par le tour opérateur, alors que ces vols ont, effectivement, été opérés.
Les compagnies aériennes refusent d’indemniser les passagers.
La Cour de Justice de l’Union Européenne observe qu’il ne s’agit pas de vols annulés, puisqu’ils ont été opérés, mais dispose qu’il s’agit de refus d’embarquement à l’avance qui doivent être indemnisés immédiatement par la compagnie aérienne conformément aux articles 4 et 7 du règlement 261/2004 du Parlement Européen et du Conseil.
Quelques extraits de l’arrêt dignes d’intérêt :
Point 38 : « […] Un passager aérien qui disposait, dans le cadre d’un voyage à forfait, d’une réservation confirmée pour un vol peut demander au transporteur aérien effectif l’indemnisation prévue à l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement dans l’hypothèse où l’organisateur de ce voyage a, sans en informer préalablement ce transporteur, avisé ce passager que le vol initialement prévu ne serait pas assuré, alors même que ce vol a été opéré comme prévu. »
Point 43 : » il ressort de l’arrêt du 26 octobre 2023, LATAM Airlines Group (C-238/22, EU:C:2023:815, point 39), que l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 261/2004, lu en combinaison avec l’article 2, sous j), de celui-ci, doit être interprété en ce sens qu’un transporteur aérien effectif, qui a informé à l’avance un passager qu’il refusera de le laisser embarquer contre sa volonté sur un vol pour lequel ce dernier dispose d’une réservation confirmée, doit indemniser ledit passager, même si celui-ci ne s’est pas présenté à l’embarquement dans les conditions fixées à l’article 3, paragraphe 2, de ce règlement. »
Point 44 : « Or, la circonstance que l’information relative au refus d’embarquement a été communiquée à l’avance au passager non pas par le transporteur aérien effectif, mais par l’organisateur de voyages ne saurait conduire à une interprétation différente de ces dispositions. »
Point 45 : « En second lieu, il découle de la jurisprudence de la Cour que le transporteur aérien effectif peut être tenu pour responsable des informations erronées relatives au report ou à l’annulation d’un vol que l’organisateur de voyages a communiquées aux passagers ».
Point 47 : « […] dans le cadre de l’article 3, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement no 261/2004, les passagers aériens peuvent se fier indistinctement aux informations transmises par le transporteur aérien effectif ou par l’organisateur de voyages concernant l’heure
d’embarquement ou leur transfert sur un autre vol. »
Point 48 : « […] règlement no 261/2004. Dans cette perspective, ce règlement vise à ce que le risque que des organisateurs de voyages fournissent des informations inexactes aux passagers dans le cadre de leurs activités soit assumé par le transporteur aérien. En effet, le passager ne participant pas à la relation existant entre le transporteur aérien et l’organisateur de voyages, il ne saurait être exigé de lui qu’il se procure des informations à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Azurair e.a., C-146/20, C-188/20, C-196/20 et C-270/20, EU:C:2021:1038, points 48 et 49). »
Point 52 : « […] Or, l’article 2, sous d), de ce règlement définit l’« organisateur de voyages » comme un organisateur, au sens de l’article 3, point 8, de la directive 2015/2302, « à l’exclusion d’un transporteur aérien ». Dès lors, suivre le raisonnement de E aboutirait au résultat paradoxal qu’un vol charter ne serait pas assuré par un transporteur aérien effectif, puisque cette qualité ne serait alors reconnue ni à la compagnie charter ni à l’organisateur de voyages.
Étant précisé que l’article 4, dont il est question, est relatif au refus d’embarquement, le dispositif de l’arrêt est le suivant :
« L’article 4, paragraphe 3, du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, […], lu en combinaison avec l’article 2, sous j), du règlement no 261/2004, doit être interprété en ce sens que :
un passager aérien qui disposait, dans le cadre d’un voyage à forfait, d’une réservation confirmée pour un vol peut demander au transporteur aérien effectif l’indemnisation prévue à l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement, dans l’hypothèse où l’organisateur de ce voyage a, sans en informer préalablement ce transporteur, avisé ce passager que le vol initialement prévu ne serait pas assuré, alors même que ce vol a été opéré comme prévu.«
A bien noter : l’article 4 prévoit que l’indemnisation, en cas de refus d’embarquement, doit avoir lieu « immédiatement ». En conséquence, il ne faut pas oublier de demander au tribunal de condamner la compagnie aérienne à l’intérêt légal sur le montant de l’indemnisation (250, 400, ou 600 euros par passager payant, suivant la distance) à compter de la date du vol en cause.
Voir https://retardimportantavion.wordpress.com
Cordialement